13/11/2010

La Cedeao, ordonne à la junte la libération de Tanja

Surpris, sinon abasourdis, les Nigériens ont encaissé, cette semaine, la décision de la Cour de justice de la Cedeao, ordonnant à la junte au pouvoir à Niamey la mise en liberté du président déchu, Mamadou Tanja. Cette décision est tombée au moment même où les Nigériens s’apprêtaient à savourer les résultats du référendum du 31 octobre, marquant le retour de leur pays dans la normalité constitutionnelle.

« Tout homme est homme », disait Barthélémy Boganda, le père de l’indépendance de la Centrafrique, à son peuple : « Zo kwe zo », en sangho, principale langue nationale. Ce précieux legs surplombe la devise, et est souvent assorti, dans les tribunaux, d’un petit « so zo la », littéralement : « celui-là aussi ». Comme pour dire aux juges que chaque être humain a droit à une justice équitable, quels que soient les crimes que l’on peut avoir à lui reprocher.

Mamadou Tanja aussi a droit à la justice, en dépit de tout le mal qu’il a pu faire aux institutions de son pays, et de l’arbitraire dont ont été victimes nombre de Nigériens, jetés en prison sur son ordre, sans jugement. Mais le droit à la justice de Mamadou Tanja ne saurait remettre en cause la hiérarchie des priorités de ce peuple, qui a un besoin urgent de retrouver la petite place que lui concédaient les bailleurs de fonds au guichet réservé aux nations les plus démunies.

La Cour de justice de la Cedeao a dit le droit. Mais il est bien plus urgent, pour l’Afrique, d’adopter, clairement, les règles qui doivent prévaloir lorsque les coups d’Etat deviennent un mal nécessaire, comme cela a été le cas au Niger, hélas ! Pour redonner une chance à l’état de droit dans ce pays, il fallait à tout prix écarter Mamadou Tanja.

A ce jour, une règle non écrite voudrait que les putschistes laissent au pouvoir issu des élections, le privilège de décider du sort du président renversé. S’il ne s’agissait que de justifier la détention de Mamadou Tanja, la panoplie des chefs d’accusation est large. L’intéressé lui-même ne le sait que trop. Tout comme il a conscience que l’on ne peut le remettre en liberté, sans autre forme de procès. Les puristes du droit peuvent-ils souffrir que, dans l’immédiat, le peuple nigérien puisse avoir d’autres priorités que le sort d’un homme qui, par son égoïsme et son entêtement, vient de faire perdre dix années de progrès démocratique au Niger ? Tout homme est homme. Tanja aussi, certes. Mais ni plus ni moins que les 14 millions de Nigériens.

samedi 13 novembre 2010 - Chronique de Jean-Baptiste Placca

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