03/11/2011

#Attac et les Amis de la Terre passent au crible les pratiques de dix #banques

A la veille de la clôture du #G20, qui se tient à #Cannes jeudi 3 et vendredi 4 novembre, et alors que la zone euro connaît une crise sans précédent, les organisations altermondialistes Attac (Association pour la taxation des transactions financières et pour l'action citoyenne) et les Amis de la Terre ont publié un rapport dit de "notation citoyenne" sur dix banques opérant en France : BNP Paribas, Banques Populaires-Caisses d'épargne (BPCE), Crédit agricole, Crédit coopératif, Crédit mutuel-CIC, Dexia, HSBC, La Banque postale, La Nef et la Société générale.

"Ça n'est pas vraiment un hasard de calendrier, même si le document était annoncé pour le mois de septembre, a confié au Monde.fr Juliette Renaud, chargée de campagne sur la responsabilité des acteurs financiers pour les Amis de la Terre et corédactrice du rapport. Depuis plusieurs années, on nous promet une régulation de la finance. Les banques sont au cœur de la crise. Or depuis 2008, rien n'a été fait !" Une inertie des pouvoirs publics qu'elle explique par deux facteurs : "le manque de volonté et de courage politique des députés français et européens" et "le lobbying intense des marchés financiers et des institutions bancaires".

"RENDRE DES COMPTES À LA SOCIÉTÉ"

Leur document se base sur les résultats d'un questionnaire envoyé mi-avril, dans la foulée du G20 finance à Washington, aux sièges nationaux des établissements bancaires dans le cadre d'une campagne commune aux deux organismes. Baptisée "A nous les banques !", elle a pour objectif de mieux cerner l'impact économique, social et environnemental de leurs activités. D'après les Amis de la Terre, cette initiative a mobilisé de nombreux citoyens, certains particuliers n'ayant pas hésiter à se rendre dans leur agence pour déposer les questionnaires et s'assurer de la participation de leur banque au projet.

Fin juin, lors de la publication du premier rapport d'étape dédié à la question de la transparence, les deux organismes se sont félicités que huit des dix établissements sollicités aient répondu favorablement à leur initiative. "Ce fort taux de réponse indique que les banques (...) – sauf exceptions regrettables – ont compris qu'elles doivent commencer à rendre des comptes à la société. Elles devront en rendre sans cesse davantage", estimait alors Attac sur son site Internet.

Les groupes BPCE et Crédit mutuel-CIC n'ont pas voulu y participer en dépit des relances de certains de leurs clients et des syndicats, précisent les associations. Selon les Amis de la Terre, un service du groupe BPCE aurait toutefois préparé les réponses au questionnaire, mais ce dernier n'a jamais été validé par la direction. François Pérol, à la tête du groupe bancaire, a néanmoins exprimé en septembre le souhait de rencontrer des représentants des deux organismes. Contacté par le Monde.fr, le groupe Crédit mutuel-CIC affirme n'avoir reçu "aucune question" des associations. "Le fonctionnement de notre groupe est un peu particulier, il est tout à fait possible qu'ils se soient adressés au mauvais service", nous a-t-on expliqué.

LES ÉTABLISSEMENTS COOPÉRATIFS : LES BONS ÉLÈVES

Le rapport rendu public mercredi dans le cadre du Forum des peuples, organisé à Nice en marge du sommet du G20, porte sur les pratiques des banques et de leur comportement. "Sont-elles responsables, remplissent-elles leurs missions en faveur de l'intérêt général et des parties prenantes concernées par leur activité ?", s'interrogent les deux organismes dans leur synthèse. Et leur conclusion est accablante : "pour la plupart des banques françaises, la réponse est clairement négative". De nombreux établissements obtiennent en effet de mauvais résultats dans les cinq grands axes examinés : la spéculation et la prise de risques, la politique à l'égard des clients, les relations avec les salariés, les impacts sociaux et environnementaux et la démocratie au sein de l'entreprise.

La Nef, établissement coopératif – qui ne dispose pas encore du statut de banque à part entière, précisent les associations –, apparaît comme le plus "vertueux", grâce à un sans faute sur les questions de stabilité financière, des politiques commerciales et de l'impact sur l'environnement et sur les populations locales. Attac et les Amis de la Terre soulignent également les bons résultats du Crédit coopératif qui, bien que membre du groupe BPCE et objet de controverses, reste fidèle aux "idéaux coopératifs et solidaires".

Sur l'ensemble des deux rapports, ces structures cumulent ainsi les meilleures évaluations. Les plus grands établissements (Crédit agricole, Société générale, HSBC et BNP Paribas) se classent loin derrière. Un représentant de la Banque postale s'est réjouit de la troisième position de l'établissement : "ça correspond à notre politique". Une source proche du secteur bancaire, qui souhaite rester anonyme, émet toutefois quelques réserves : "certains points de méthodologie pourraient être discutés. Il faudrait voir clairement leur grille d'analyse et leurs procédés de pondération."


"Sur le fond, on n'est pas très étonnés du niveau de certaines banques, mais on est très contents de la réactivité des établissements et du taux de réponses", explique Juliette Renaud. Les données relatives à certaines questions – notamment environnementales – n'étaient pas toujours disponibles dans les banques sollicitées, "ce qui montre bien le degré d'intérêt qu'elles portent à ces thématiques", déplore-t-elle.

QUEL IMPACT POUR CES TEXTES ?

"A l'heure actuelle, nous sommes interrogés en permanence, par des gens qui ne comprennent pas toujours le secteur bancaire et qui nous posent des questions que l'on ne comprend pas nécessairement. Ça n'est pas très productif", a-t-on estimé au Crédit mutuel-CIC. Et de préciser toutefois : "nous ne pouvons et ne sommes pas en train de nous exprimer directement sur cette étude, dans la mesure où nous ignorons la tenue du questionnaire".

Consécutivement à la publication du premier rapport d'étape, "Les banques sont-elles transparentes ?", la quasi-totalité des établissements évalués ont fait parvenir des compléments d'information pour répondre plus spécifiquement aux questions posées, rapportent les deux organismes. "Plusieurs banques sont montées dans le classement, et donc ont augmenté en transparence suite à la publication du premier rapport, précisent-ils. Preuve s'il en est que la pression citoyenne est non seulement utile mais nécessaire."

Pour la Société générale, il était important de participer à cette initiative. "Nous avons conscience d'être au cœur de l'économie. On essaie d'exercer notre métier de façon responsable. C'est un travail de longue haleine et nous avons une réelle volonté d'amélioration", explique une représentante du groupe. Même son de cloche du côté de La Nef, arrivée en tête du classement. "On ne peut être que content que l'action que l'on mène soit reconnue, mais on ne fait pas ça pour la gloire, considère Jean-Marc de Boni, président du directoire de l'établissement. C'est intéressant d'avoir un regard extérieur qui pointe du doigt les secteurs qui nécessitent des améliorations. C'est le cas pour nous en termes de démocratie et dans une certaine mesure de politique salariale. Nous nous attelons d'ores et déjà à progresser sur ces sujets."

Les deux associations parlent d'un "premier succès". "On a été surpris par l'impact du premier rapport, même si je pense que les banques ont été plus motivées par le besoin de préserver leur réputation que par l'amour de la transparence, s'amuse la chargée de campagne des Amis de la Terre. On s'attend à pas mal de retours sur le second texte. Le thème – les pratiques – est essentiel et le devient plus encore dans ce contexte de crise économique mondiale."

Mais Juliette Renaud prévient, "c'est un premier pas" : pas question de s'en contenter. "Ça n'est pas : 'on publie un rapport, les banques participent et tout s'arrête là'. Il est urgent de réintroduire un contrôle citoyen sur les acteurs économiques, poursuit-elle. Pour qu'enfin chacune des parties concernées par ce secteur puisse faire entendre sa voix."

Aude Lasjaunias - LEMONDE.FR | 03.11.11 | 19h02 • Mis à jour le 03.11.11 | 19h29

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