Non au délit de faciès", titre le quotidien après l'attaque contre le domicile d'un touareg à Kati, à 15 km de la capitale Bamako. Depuis que les rebelles touareg du Mouvement national pour la libération de l'Azawad (MNLA), ont lancé mi-janvier une offensive en attaquant plusieurs villes du nord du Mali, la tension monte dans tout le pays. Le 1er février, le président Amadou Toumani Touré est intervenu à la télévision pour tenter de calmer les esprits. Les combats entre touaregs et soldats maliens ont fait des dizaines de morts ces dernières semaines.
Beaucoup d’inquiétude dans le pays devant cette rébellion touarègue qui semble s’implanter durablement. Mercredi, face aux recrudescences de violences qui ont touché ces derniers jours des membres de la communauté touarègue ou arabe, notamment à Kati dans la région bamakoise, le président ATT a appelé ses compatriotes à ne pas faire l’amalgame, à ne pas confondre ces communautés avec les assaillants du Nord.
Et la presse malienne embraye ce matin : «évitons l’amalgame !», reprend le quotidien Le 22 Septembre . «Ce qui s’est passé à Kati est très grave, parce que nul ne doit payer pour la faute d’un autre. (…) Ce qui s’est passé à Kati est très grave, parce que les victimes de cette situation pourraient désormais écouter les chants de sirène venant du MNLA. (…) Ce qui s’est passé à Kati est très grave, parce que nombreux sont les Traoré, Dougnon, Diarra, Coulibaly, Touré, Haïdara, Cissé… qui ont eux aussi la 'peau rouge' et ne sont pas pour autant favorables au MNLA. Ce qui s’est passé à Kati est très grave, lance encore Le 22 Septembre, parce que cela arrange l’ennemi. Il faut donc éviter l’amalgame qui consiste à frapper toutes les 'peaux rouges' avec le même bâton.»
«Non au délit de faciès», insiste Le Républicain . «En dépit des messages du président de la République, du Haut Conseil Islamique et des Ressortissants de Tombouctou, messages d’apaisement et de solidarité, les rues de Bamako se sont vidées de Touaregs et d’Arabes, constate le journal. La psychose monte et aucune incantation n’arrêtera les mouvements d’humeur, l’arme dévastatrice de l’amalgame, la haine facile et leur triste corollaire : le chemin des réfugiés pour ceux qui ne sont pas moins Maliens que quiconque, qui n’ont tiré ni à Aguel Hoc ni à Niafounké et qui, comme tout patriote, souhaiterait que force et moyens restent à la République. Au vertige qui sait saisir des foules en colère, le discours ne suffit pas», déplore encore Le Républicain.
Elections ou transition ?
Inquiétudes politiques également face à conflit : avec notamment cette question posée par le quotidien L’Indépendant : le président «ATT pourra-t-il tenir les élections dans les délais ou va-t-il opter pour une nouvelle transition ? (…) Maintenant que les régions de Tombouctou, Mopti, Gao, Kidal et une partie des régions de Ségou et Koulikoro connaissent une situation sécuritaire grave et préoccupante, peut-on parler d’élections dans ces conditions ? Voilà toute la question que ne cessent de se poser les Maliens de toutes conditions sociales. (…) Tous sont inquiets. Si ATT n’arrive pas à organiser les élections, que deviendra le pays ?», s’interroge encore L’Indépendant. «Va-t-il lui-même conduire une nouvelle Transition ou va-t-il laisser le fauteuil présidentiel, au terme de son mandat le 8 juin prochain, à un président intérimaire qui va organiser le retour de la paix et… plus tard les élections ? A trois petits mois de la présidentielle du 29 avril, tous les scénarios sont envisageables.»
ATT coincé ?
Beaucoup de questions également dans la presse de la sous-région. «Bamako a-t-il perdu le Nord ?», se demande Le Pays au Burkina. Le Pays qui estime que les autorités maliennes et en l’occurrence, le président ATT, n’ont pas pris suffisamment au sérieux cette rébellion. «La recrudescence de la rébellion touarègue entache le mandat finissant de ATT qui, à force de négocier la paix, a tout simplement oublié de préparer cette guerre inévitable parce que les revendications du MNLA sont tout simplement irréalisables, affirme le quotidien burkinabé. «Tôt ou tard, poursuit-il, il faudra se décider à agir collectivement, soit pour faire la guerre, soit pour gérer politiquement le statut définitif de ce peuple.»
Pour L’Observateur, toujours au Burkina, «à l’évidence, cette crise ne saurait avoir un dénouement militaire. Le dialogue est la seule arme qui peut faire taire les armes. C’est pour cela que le président malien ne doit pas hésiter à engager des pourparlers avec le MNLA, préconise le quotidien ouagalais, ou à recourir aux bons offices de médiateurs capables d’instaurer la confiance et le dialogue entre les deux parties belligérantes. Il est vrai que, par le passé, il avait déjà essayé cette thérapie avec plus ou moins de succès. Mais le relatif échec de cet épisode ne doit pas décourager le président malien. Au contraire, insiste L’Observateur, à notre avis, il doit persévérer dans la recherche d’une solution politique, seul gage de stabilité et de paix durable.
Une chose est certaine, ce problème touareg vient assombrir le tableau du général-président ATT, arrivé au bout de son ultime mandat, analyse également le quotidien burkinabé. Et voilà ATT obligé de revoir ses plans de fin de mandat, lui qui s’attendait à remettre le pays à son successeur pour aller se la couler douce. Si une solution rapide n’est pas trouvée, il sera sans doute contraint de jouer les prolongations, car il sera difficile d’organiser un scrutin dans un pays en conflit.»
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