La mal-gouvernance politique entraîne immanquablement une mal-gouvernance économique, et l’ère Mamadou Tandja au Niger a surtout brillé par son manque de clarté dans la passation des contrats dans le juteux secteur minier : en 2005, les médias avaient fait une bonne tartine sur une histoire de pot-de-vin de près de 2,5 milliards de francs CFA, que la société « Niger uranium venture SA » aurait versé au fils du président déchu et à un de ses amis.
La junte au pouvoir au pays d’Hamani Diori depuis février dernier a entrepris de donner un coup de ballai dans ce milieu, en allant à la pêche aux gros « poissons » qui nageaient dans les eaux paisibles contrôlées alors par l’ancien capitaine à bord du bateau battant pavillon Niger. Déjà au lendemain de son arrivée à la tête du pays, le chef des insurgés avait particulièrement insisté sur la nécessité de procéder à un assainissement de la situation politique et économique.
Une Commission de lutte contre la délinquance économique, financière et fiscale, qui est très vite allée au charbon, a donc été mise en place. Ainsi, un ex-ministre du gouvernement Tandja, un fils de celui-ci et d’autres personnes sont tombés dans la nasse tendue par Salou Djibo et ses camarades du Conseil suprême pour la restauration de la démocratie (CSRD) : il s’agit de Mohamed Abdoullahi, ministre des Mines du vieux régime ; d’Hadia Toulaye Tandja, fils de son père ; du journaliste Ibrahim Hamidou ; de même que d’autres hauts responsables ayant bénéficié d’importants privilèges sous le règne de l’ex-maître de Niamey.
Le Niger, un des pays les plus riches en uranium, est, paradoxalement, l’un des plus pauvres au monde, la mainmise de ses dirigeants sur les retombées de ce minerai étant un puissant facteur favorisant cela. La conséquence directe qui en résulte est la paupérisation continue des populations et le retard prononcé du pays dans son évolution vers un développement véritable et durable. La campagne d’assainissement et de moralisation lancée par le CSRD se veut alors un gage de crédibilité, un avertissement aux politiciens nigériens qui seront appelés aux commandes très prochainement, comme pour leur rappeler que « bien mal acquis ne profite jamais ».
Elle sonne comme une volonté manifeste des militaires de ne point se limiter à la restauration de la démocratie au Niger, mais d’aller plus loin avec l’assainissement des finances publiques. La cause sera-t-elle entendue ? C’est en tout cas le souhait des tombeurs de Mamadou Tandja, qui n’ignorent pas que tout n’est pas donné d’avance. En effet, il faut rester réaliste et ne pas écarter la donne politique du revers de la main.
Le nouveau calendrier électoral que le Conseil consultatif national a proposé limite à douze mois la durée de la transition depuis le putsch. Cela donne du temps à l’ancien locataire de la présidence nigérienne et à ses soutiens pour continuer à se murer dans le silence total dans l’attente de jours favorables. La pression continue des puissances étrangères est aussi à prendre en compte. Paris, par exemple, aurait insisté pour que Niamey abandonne ce qui s’apparente, à ses yeux, à une chasse aux sorcières à l’encontre de Tandja et de sa garde rapprochée.
Dernièrement, à la veille du sommet de Nice, des émissaires de Sarkozy auraient séjourner au Niger dans cette optique. Visiblement, la junte n’en a pas fait une préoccupation, décidée qu’elle est de poursuivre sa mission de moralisation publique.
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